Protection du Parc naturel de Llanganates et de sa forêt primaire

Conservation de la forêt primaire en collaboration avec le Ministère de l’environnement équatorien et les populations locales.

 

#1 L’Amazonie équatorienne : une biodiversité unique qui vit au rythme de l’exploitation anarchique de ses ressources.

En 2002, lors de la Déclaration de Cancun, l’Equateur s’est vu décerné le titre de pays méga diversifié aux côtés de seize autres états. Sa biodiversité est exceptionnelle, ses 71 formations végétales accueillent plus de 16 000 espèces de plantes dont plus du quart sont endémiques. Occupant seulement 1,3% de la superficie totale d’Amérique Latine, mais doté d’une densité d’espèce presque sans équivalent, l’Équateur se place en neuvième position mondiale de diversité spécifique de mammifères avec 452 espèces natives, troisième pour les amphibiens avec 636 espèces, quatrième pour l’avifaune avec 1644 espèces d’oiseaux continentaux, septième pour les reptiles avec 502 espèces répertoriées.
L’unicité de ce pays rend primordiaux les efforts de conservation de ses écosystèmes.

 

Ishpingo a délimité sa zone d’action entre la « Troncal amazonica » à l’est, une route qui scinde l’Amazonie en deux et le Llanganates à l’ouest, un Parc National qui occupe 219 000 hectares, à cheval entre la Cordillère des Andes et l’Amazonie haute. Ce parc est un lieu mystérieux, riche en légendes et en espèces à découvrir. Son cœur, quasi inexploré, abriterait le trésor des Incas : une montagne d’or cachée par le général du dernier empereur Inca, Atahualpa, dont le corps reposerait également dans cet eldorado.
Plus que les scientifiques, ce sont les chercheurs de trésor qui s’y sont aventurés, tant son relief est accidenté et sa nature réputée hostile. Sa biodiversité est par conséquent peu décrite. Ainsi, les expéditions naturalistes floristiques, herpétologiques ou entomologiques permettent fréquemment la découverte de nouvelles espèces. Récemment le couloir écologique regroupant le Parc Llanganates et le Parc Sangay a été officialisé comme le site à plus haute densité de reptiles et d’amphibiens à l’échelle mondiale, avec 287 espèces. À titre d’exemple, la France métropolitaine en compte environ 80 pour une superficie 600 fois supérieure !
Mais outre sa biodiversité et ses histoires, le parc nationale Llanganates regorge de ressources exploitables : eau, bois, gibier, futures terres agricoles, mais surtout minerais et en particulier l’or.
Son relief extrêmement accidenté l’a protégé jusqu’à récemment de l’exploitation par l’homme puisqu’aucune route ne le traverse. Malheureusement la population équatorienne augmente rapidement et la forêt Amazonienne est de plus en plus rapidement colonisée. Et cela inclus le parc national Llanganates et sa région. Les politiciens en ont conscience et pour gagner des votes, un projet de route le traversant est à l’étude. Les orpailleurs organisés en mafia soutiennent ce projet qui leur donnera accès aux montagnes d’or. Au regard de projets similaires passés, il est évident que la construction d’une première route signerait tout simplement l’arrêt de mort d’un écosystème unique. Mais cela importe a peu de monde. À part peut être aux populations natives kichwas qui vivent dans les villages en bordure du parc. Alors, depuis 10 ans, nous réfléchissons ensemble et mettons en place des actions pour éviter sa destruction. Et pour cela nous avons des alliés indispensables au sein du ministère de l’Environnement.

 

#2 Reboisement en bordure du parc national llanganates

Reboisement et protection du parc naturel de LlanganatesLa déforestation sélective des principales espèces de bois d’œuvre depuis plusieurs décennies a causé la quasi-disparition de ces espèces dans les fermes. Le bois restant un matériau indispensable, notamment pour la construction de maisons, il devient rare et source de conflits. Pour éviter les coupes illégales dans le parc national Llanganates il est primordial de reboiser les fermes des populations indigènes aux alentours.
Depuis 2014 l’association Ishpingo travaille en partenariat avec le Ministerio del Ambiente Ecuatoriano (Ministère de l’Environnement équatorien) en charge de la protection du parc national qui s’étend sur une surface de plus de200 000 hectares, de la cordillère des Andes à l’Amazonie. 2 gardes forestiers locaux surveillent le secteur « Amazonie » du parc naturel. Leurs activités sont très diverses et les moyens dont ils disposent sont faibles. Ils doivent notamment contrôler la coupe illégale de bois, le braconnage, l’orpaillage, la pollution des rivières
Pépinière aux abords du parcÉtant l’unique ONG travaillant sur la reforestation dans la région, ils nous ont contactés afin que nous puissions leur apporter notre soutien. Une pépinière a été construite et nous avons formé les 2 gardes à la production de plantes en pépinière et aux activités de plantation et de suivi. Chaque année 2 000 à 4 000 plants sont produits et distribués aux populations locales vivant dans la zone tampon du parc Llanganates. Les opérations de reboisement s’effectuent avec les agriculteurs les plus motivés, les écoles et les collèges du secteur. Nous avons ainsi replanté 20 000 arbres et « ojala » notre collaboration n’est pas près de s’arrêter…

 

#3 Protection des arbres mères et création d’une banque de graines

Pour planter des arbres il faut des graines, beaucoup de graines ! Et en plus il faut que ce soient des graines de qualité, issues d’arbres mères ayant d’excellentes caractéristiques morphologiques, un taux de croissance élevé ainsi qu’une bonne résistance aux maladies et aux parasites.Un arbre mère magnifique en plein coeur du parc naturel de Llanganates Cependant, il ne faut pas non plus produire tous les plants d’une même espèce à partir d’un ou deux arbres mères, sinon la variabilité génétique diminue, ce qui fragilise l’espèce et conduit inexorablement à son déclin. Une fois de plus, la déforestation sélective a eu raison des populations d’essences de bois d’œuvre et il ne reste malheureusement que très peu d’individus de qualité par espèce. Et cette tendance s’accentue. Nous pourrions attendre la production de graines des arbres issus des premières plantations réalisées par Ishpingo, il y a 10 ans, mais d’ici à ce que ces arbres soient effectivement en mesure de produire leurs premières graines, nous pourrions tomber en rupture de stock.
Devant cette problématique inquiétante, Ishpingo a pris la décision, en 2017, de lancer une nouvelle activité de conservation qui consiste à protéger des arbres mères dans les réserves privées de certains locaux, ou groupes de locaux, préoccupés depuis toujours par leur environnement. Nous pensons qu’un arbre mère est un bien commun et de ce fait il ne doit pas être à la charge seule de son propriétaire. Dans cette optique, le propriétaire reçoit une compensation financière qui le dissuade définitivement de couper l’arbre. En échange, il met à disposition les graines produites par l’arbre mère. Il s’agit bel et bien d’une banque de graines in situ dont tout le monde peut profiter…

 

#4 Création d’un lieu dédié au contrôle des ressources, à l’information et au dialogue

Orpaillage illégal en AmazonieLa situation géographique du parc national Llanganates lui confère une singularité sans pareille. Ancré entre l’Amazonie et la Cordillère des Andes entre 600 et 4000m d’altitude, cet écosystème qui abrite le fameux ours à lunette possède un climat très spécifique. On y recense une très forte biodiversité et de nombreuses espèces endémiques.
La protection de ce parc est une priorité pour l’association Ishpingo. Et même si nous sommes convaincus que la sensibilisation, le dialogue et la participation des populations locales est la meilleure manière de protéger la forêt et les ressources qu’elle fournit (eau, air pur, biodiversité, bois…), devant l’urgence de la dégradation de réserves telles que l’on peut l’observer à tous les niveaux, un contrôle des ressources est nécessaire.
Point du contrôle du parcPour cela, le Ministère de l’Environnement équatorien en charge de la protection des ressources naturelles a construit, en 2019, un point de contrôle sur l’unique voie d’accès proche du parc Llanganates afin de lutter contre la coupe illégale de bois, l’orpaillage et le braconnage. En manque de budget, le ministère de l’environnement nous a sollicité pour participer au financement de ce point de contrôle nécessaire. En 2022, grâce à des fonds propres d’Ishpingo, nous avons pu les aider à terminer la construction et à l’équiper pour le rendre fonctionnel, Fini les réunions informelles au détour d’un sentier, à l’épicerie du village ou chez les gardes parcs. Nous pouvons désormais recevoir les organisations locales publiques et privées dans une salle de réunion équipée avec une connexion internet afin de réfléchir sur le développement des activités de recherche et de protection des forêts environnantes. Avec sa cuisine et ses dortoirs, nous l’avons également converti en refuge à partir duquel nous partons observer et mesurer la biodiversité accompagnée de naturalistes professionnels.

Ce bâtiment rempli aujourd’hui de nombreuses fonctions : point de contrôle, refuge, bureaux, hangar. Tout ça au rez-de-chaussée. Mais il y a aussi un étage vide, sans mur. Un espace de 90m2 disponible, que le ministère de l’environnement a mis à notre disposition pour le convertir en une Maison de Parc : un espace pédagogique et muséographique ayant pour vocation la libre circulation de l’information auprès des populations locales ainsi que la médiation entre les différents acteurs. Un lieu basé sur l’échange et le partage dans un objectif de mise en réseau, de partenariat et d’ouverture favorisant la mise en place d’actions concrètes pour le bien de l’environnement et de ses habitants.